NDLR: Ma Chronique du disque pour le mois d’août est un peu
particulière – elle comprend en plus de ma revue de cinq albums quelques
anecdotes de mon récent voyage à Toronto.
Si vous cherchez plus de détails à propos de mon barème
d’évaluation pour la Qualité Sonore et l’Impression Globale,
veuillez lire quelques unes de mes chroniques précédentes
HUMMEL: Piano Trios Nos. 1, 5 and 7
[eMusic]
[eMusic]
Le compositeur Autrichien Nepomuk Hummel (1778-1837) est
un contemporain de Beethoven et est considéré un des grands compositeurs de son
époque. Connu sutrout pour son œuvre pour piano (et son non-moins célèbre
concerto pour trompette), on commence à redécouvrir sa musique de chambre.
L’album proposé ici, datant de plusieurs années déjà, fat partie de cette
exploration, et met en vedette le trio Borodine dont faisait partie le regretté
Yuli Turovsky. Le charme de ces trios, pour moi du moins, est leur fraîcheur –
parce que justement pas des trios de Beethoven ou Mendelssohn, il est
rafraĉhissant d’entendre comment un autre compositeur approche cette
combinaison d’instruments. Hummel (comme la plupart de clacissistes purs et
durs) adhère scrupuleusement à la forme classique d’un trio ou d’une sonate,
mais ceci ne veut pas dire qu’il n’y a rien d’original – bien le contraire. Le
jeu d’ensemble est impeccable. QS = A, IG = A.
Le bon vieux temps
Il n’y a pas si longtemps – dix, peut-être vingt ans – le
mélomane aguerri se devait de visiter un disquaire pour se procurer un
enregistrement. Les disquaires, franchisés ou indépendants, couraient les rues
commerciales et les centres d’achats. Mes hantes préférées à Montréal pendant
ces belles années étaient Pierre Leblanc Musique sur la rue Mont-Royal
(le tenancier avait même une chronique hebdomadaire à la télé), l’une ou
l’autre des succursales de Bertrand Musique (Places Bonaventure et
Ville-Marie), et les grande surface A & A et Sam the Record Man
sur la rue Sainte-Catherine.
Peut-être suis-je trop nostalgique, mais une visite chez le
disquaire était quelque chose de spécial pour moi. Ah, de flâner les rayons, de
fureter les pochettes, ornées de la marquise dorée de Deutsche Grammophon
ou même les photos ou images inspirées par le contenu de l’album. Lire l’endos
de ces pochettes, afin d’en savoir plus sur l’œuvre, ou les interprètes. Des
heures durant, j’étais tranformé, perdu dans mes vaps qu’on dirait.
Des disques et des cassettes, la technologie évolua aux
disques compacts. Finies les pochettes… Toutefois, même si les visites pour moi
devenaient de plus en plus rares, je dois faire la confession que j’ai plus
d’une fois « semé » mon épouse dans un centre d’achats pour me
faufiler chez le dépositaire HMV ou Music World.
Puis, un phénomène étrange s’est produit : ces
dépositaires ont commencé à fermer leurs portes. Dans le cas de M. Leblanc
probablement sous la pression du marché et le coût grandissant de l’inventaire
requis. Pour d’autres, ils sont tout simplement disparus car les habitudes d'achats du public
ont grandement changé. Si je visite mon HMV local aujourd’hui, plus de la
moitié de leur inventaire est dédié aux DVD et même les rayons de musique
populaire sont plus modestes. Et le classique… une portion d’un rayon au
fin-fond du magasin, et je serais surpris si on renouvelle l’inventaire de
cette mince collection.
Le disquaire « brique et mortier » est maintenant
un disquaire virtuel – Amazon eBay et autres sites spécialisés pour les titres
rares ou usagés, et bien sûr iTunes et eMusic qui vendent les plages à la pièce
pour 49 ou 99 sous. Pourquoi flâner pour trouver un titre en particulier quand
en quelques secondes votre moteur de recherche préféré trouve une douzaine de
façons de se le procurer!
C’est plus la même chose.
Et pourquoi donc ce long exposé, me demanderez-vous? Eh
bien, ceci m’amène à mon récent séjour à Toronto.
Il y a quelques années, lors d’une excursion similaire,
j’avais visité la grande surface HMV au cœur du centre-ville de la Ville Reine;
trois étages de disques, dont le troisième étaiot dédié au jazz et au
classique. Comme dans le bon vieux temps, l’étage était « isolé »
afin de couper le bruit du reste du magasin, et la grande musique envahit tout
le plancher, un oasis de paix!
Ainsi donc, après m’être assuré que madame et notre fille
étaient affairées à leurs achats au Centre Eaton, j’ai vite fait le court saut
au disquaire. Que de changements – et pas nécessairement pour le mieux.
Les portes de verres grandes ouvertes au pied de
l’escalateur au troisième, le Rap et la musique urbaine occupe maintenant au
moins le tiers – sinon la moitié – de mon vieil oasis. Il y a encore une
collection classique et jazz intéressante (à comparer aux dépositaires
franchisés qu’on retrouve dans les centres commerciaux) : un ou deux
rayons, et deux murs. Et, en partie, on y retrouve des DVD d’opéras et concerts
entremêlés aux CD de musique. Ce n’est pas le Pérou, quoi.
Une petite douche froide, mais j’ai tout de même trouvé
quelques titres (4 albums, 6 disques, moins de $50). Voici donc un aperçu de
mes achats:
A Grand Concert Of Musick: Archiv Produktion CD & Catalogue
[En Magasin]
[En Magasin]
Ma première sélection est une trouvaille dans la section “rabais” du magasin ($10 pour le disque et le catalogue) et propose la réédition d’un disque vinyle Arkiv datant de 1977 (avec une plage additionnelle datant de 1984) mettant en vedette Trevor Pinnock et son English Concert. Le répertoire offert ici est essentiellement du baroque Anglais, avec comme clou la première symphonie de William Boyce. Pinnock et son rival (sur DECCA) Christopher Hoigwood sont passés spécialistes dans ce répertoire, et là où Pinnock remporte la palme est au niveau de la qualité d’enregistrement. C’est, bien sûr, super-HIP. Et le catalogue fait plaisir à ce vieux collectionneur. QS = A, IG = A.
Tchaikovsky, Sibelius: Violin Concertos / Oistrakh, Ormandy,
Philadelphia Orchestra
[En Magasin]
[En Magasin]
J’ai fait allusion plus souvent qu’à mon tour au quatuor de
solistes Soviétiques qui ont souvent voyagé en Occident pendant les années de
la Guerre Froide: Richter, Gilels, Rostropovich et Oistrakh. Lors d’une visite
en Amérique en 1959, Oistrakh a eu l’occasion de jouer en compagnie du
Philadelphia Orchestra et de son chef légendaire, Eugene Ormandy. Ce disque,
réalisé lors des années précoces de la stéréophonie, grave pour la postérité
cet heureux ménage dans deux chefs-d’œuvre du répertoire pour violon et
orchestre. Dans maa collection vinyle, j’ai une réédittion datant de 1974 de cet enregistrement du Tcahïkovski, et c’est avec un malin plaisir que je retrouve
cette prestation. Je ne sais pas si MM. Oistrakh et Ormandy avaient de bonnes
relations, mais leur complicité dans cette œuvre fort jouée saute aux
orieilles. Dommage qu’Oistrakh ne joue pas les reprises au troisième mouvement…
Tant qu’au Sibélius, c’est une découverte pour moi. Oistrakh joue le concerto
avec brio, et M. Ormandy le suit admirablement – mais l’accompagnement
n’est pas du même calibre que le Tchaïkovski à mon avis. Reste qu’il s’agît ici
d’un magnifique document, restauration numérique fort honorable. QS = A-, IG
= A-.
Le fantôme de Glenn
Une autre anecdote de voyage, celle-ci plus subtile.
La rue Yonge à Toronto est son artère Nord-Sud principale,
ornée de marquises illuminées, de lieux (plus ou moins) savoureux, et ce en
particulier dans sa partie Sud, au centre-ville. Nous faisions une randonnée le
long de cette rue vers l’heure du dîner, et alors que nous approchons l’angle
Yonge et College, on pouvait voir une paire de restaurants sur la rue
transversale. Le restaurant choisi pour le dîner, une décision spontanée, fut
le restaurant Fran’s (on dirait en français, Chez Fran). C’est ce qu’on
appelle en anglais un « diner », cet espeèce de restaurant des années
d’après guerre où on servait des plats « de chez nous », souvent
assortis de frites, de sauce brune et rincé par un large Milk Shake.
L’ancêtre direct de la restauration rapide, quoi.
Ce qui est particulier à propos de ce restaurant – en fait,
il s’agît d’une chaîne – c’est que le restaurant original (hyper-modeste, avec
seulement qu’une poignée de sièges) était fréquenté régulièrement par Glenn
Gould. Le restaurant original est fermé depuis longtemps, mais la succursale Yonge et College fut établie en 1950, et rénovée il y a quelques années afin
de rehausser son caractère original.
Glenn Gould était un musicien for excentrique, mais que dire
de ses goût culinaires? Était-il tout aussi particulier à propos de ses plats?
Je ne crois pas que le menu du Fran’s d’aujourd’hui soit le même qu’il y a
quarante ou cinquante ans, mais j’étais fort satisfair de la lasagne au four.
Si, toutefois, Glenn était « difficile » pour la nourriture, il
aurait été fier de ma fille, qui commanda un fettucine, pour finalement séparer
tous les morceaux qui semblaient être des champignons (même s’ils étaient de
oignons ou des tomates) un peu comme un mineur sépare les pépites d’or du tas
de caillous qu’il a déniché. Et madame… Elle, qui ne mange que du pain brun,
refuse le pain de son sandwich au poulet grillé: « Deonnez-le moi dans l’assiette,
c’est tout ».
Au sortir du restaurant, j’ai rapidement indiqué l’édifice qui nous fait face, l’autre côté de la rue à mon épouse : « Ceci était le grand
magasin Eaton de Toronto ».
Les magasins à rayon Eaton, comme ceux de la Compagnie de la
Baie d’Hudson, font partie d’une grande tradition comerciale au Canada. Il y
avait des magasins Eaton d’un océan à l’autre pendant plus d’une centaine
d’années. Aujourd’hui, victime de la compé.tition féroce des grandes surfaces
américaines comme Wal-Mart, les magasins à Rayons sont presque tous disparus au
Canada – Simpson's, Zeller's, Dupuis-Frères, et Eaton (maintenait sous la bannière
Sears). Mais pendant les belles années du XXe siècle, les Eaton
« principaux », dont ceux de Toronto et de Montréal, étaient des
temples du commerce.
La famille Eaton, vers 1925, voulait construire un nouveau magasin à Toronto afin de remplacer sa grande-surface désuète (ironiquement, ce premier magasin de Toronto, sur la rue Queen, se trouve près d’oû Eaton construira un nouveau grand magasin vers 1975 et le centre qui portera son nom). Lady Eaton, la matriarche du clan, affectionnait particulièrement les arts et voulait doter le nouveau magasin d’un espace digne pour ses activités. Inspirée par l’opulence des grands paquebots, elle engage le Français Jacques Carlu afin de concevoir ce nouvel espace, qui occupera tou le septième étage. Carlu, qui fera la même chose pour le magasin de Montréal et qui créera le fameux Rainbow Room à New York, propose un espace somptueux, orné de fontaines et de chandeliers, avec un foyer qui donne accès à deux aires spécifiques : un restaurant et une salle de concert.
La famille Eaton, vers 1925, voulait construire un nouveau magasin à Toronto afin de remplacer sa grande-surface désuète (ironiquement, ce premier magasin de Toronto, sur la rue Queen, se trouve près d’oû Eaton construira un nouveau grand magasin vers 1975 et le centre qui portera son nom). Lady Eaton, la matriarche du clan, affectionnait particulièrement les arts et voulait doter le nouveau magasin d’un espace digne pour ses activités. Inspirée par l’opulence des grands paquebots, elle engage le Français Jacques Carlu afin de concevoir ce nouvel espace, qui occupera tou le septième étage. Carlu, qui fera la même chose pour le magasin de Montréal et qui créera le fameux Rainbow Room à New York, propose un espace somptueux, orné de fontaines et de chandeliers, avec un foyer qui donne accès à deux aires spécifiques : un restaurant et une salle de concert.
La salle de concert, baptisée l’Auditorium Eaton, était avec
le fameux Massey Hall l’uine de deux salles destinées pour la musique
séculaire à Toronto. Plus intime que le Massey, l’Auditorium était un endroit
idéal pour un récital intime, et les grands noms de la musique –Sinatra,
Ellington… - ainsi que le Ballet National du Canada on marché sur ses planches.
Glenn Gould était fier de l’auditorium de sa ville natale, affirmant que son
acoustique était la « meillleure en Amérique du Nord ». Gould fera un
bon nombre d’enregistrements à cet endroit; oiseau de nuit légendaire,
Gould insistera pour qu’on enregistre la nuit (alors que les ascenseurs du
magasin étaient silencieux), et que les sessions s’arrêtent à temps pour son
déjeuner matinal.. chez Fran's, bien sûr!
Nous sommes maintenant en 1977, et Eaton ouvre son nouveau
magasin dans ce qui deviendra le Centre Eaton. L’édifice à Yonge et College est
vendu à un entrepreneur qui le transforme en surface commerciale et en espaces
de bureau. N’ayant aucun intérêt pour le restaurant ou la salle de concert, on
planifie de les raser pour créer plus d’espace. Glenn Gould acquiert même le piano
de l’auditorium pour son propre usage…
Avant qu'on entreprenne des travaux, des citoyens foint appel
au gouvernement, qui désoigne le septième étage « site historique »,
et les tenanciers mettent simplement un cadenas à la porte. Vers 2001, un
groupe d’investisseurs fait l’achat de l’espace, et entreprend de le restaurer
suivant la vision originale de Carlu. Aujourd’hui, l’espace est offert pour des
évènements spéciaux – visitez le site pour
des photos.
Glenn Gould plays Beethoven: 32 Variations WoO 80;
"Eroica" Variations op. 35; 6 Variations op. 34
[En Magasin]
[En Magasin]
Je l’admets, j’ai fouillé pour un disque Gould, et qui s’y frotte, s’y pique… Quelques mots d’entrée: 13 des plages de cet album de deux disques furent enregistrés à l’Auditorium Eaton (les deux cycles de bagatelles) et l’un des disques comporte les trois principales variations pour piano seul de Beethoven (ses opp. 34 et 35, et le « sans opus » 80). Les lecteurs assidus de la chronique savent que j’ai un enregistrement historique de la Société Radio-Canada dans ma collection où Gould exécute les opp. 34 et 35 (donc environ 15 ans avent celles-ci). Il y a certes une maturation, moins de spontanéité, et plus de maniérismes dans cet enregistrement de studio, que je qualifierais de « norme pour le parcours » avec notre Glenn national. La meme attention scrupuleuse aux indications dui compositeur s’appliquent aux bagatelles et à la courte sonate. La mise en garde d’usage s’applique quand à Gould, mais ceci ne change pas mon opinion du résultat. QS = A, IG = A.
Collection emergence, ANDRE GAGNON
[Store Purchase]
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Passons de l’anti-Romantique au Romantique. Plus de mille
kilomètres séparent le centre-ville de la Ville Reine et
Saint-Pacôme-de-Kamouraska, le village natal du pianiste, compositeur,
arrangeur et accompagnateur André Gagnon. Le cadet d’une famille de 19 enfants (oui messieus-dames, dix-neuf!),
Gagnon suit des leçons de piano avec un prêtre de la région, et trouve le
chemin du Conservatoire à Montréal – et des boîtes à chanson locales. Après le
conservatoire, une bourse d’études l’amène à Paris où il étudiera avec Yvonne
Loriod et passera ses temps libres à accompagner Georges Moustaki! L’écrin
d’aujourd’hui (vu à Toronto lors de mon passage en 2010 et encore disponible dans
ses rayons!) se veut une compilation des premières années de Gagnon, marquées
par sa longue et fructueuse collaboration avec Claude Léveillée et d’autres
chansonniers québécois. En plus d’extraits de ses premiers disques de
« musique d’ascenseur », l’écrin renferme trois rééditions intégrales
d’albums de Gagnon comme compositeur (qui précèdent ses disques fétiches comme Neiges
et Le Saint-Laurent): Mes Quatre Saisons et Les
Turliuteries sont des arrangements/adaptations de chansons québécoises à la
mode baroque et Projection, qui contient l’essentiel des plages
composées pour le téléroman de Radio-Canada Les Forges de Saint-Maurice.
Pour moi, c’est un beau voyage nostalgique à travers des plages que je connais
fort bien, car dans ma collection vinyle. QS = A-, IG = A.
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